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Aktenzeichen
19101/03
Datum
10. Juli 2006
Gericht
Europäischer Gerichtshof für Menschenrechte
Gesetz
Europäische Menschenrechtskonvention
Europäische Menschenrechtskonvention

Urteil: Europäischer Gerichtshof für Menschenrechte am 10. Juli 2006

19101/03

In dem Fall "Sdružení Jihočeské Matky gegen Tschechische Republik" sieht der Europäische Gerichtshof für Menschenrechte einerseits die Schwierigkeit, aus Artikel 10 der Europäischen Menschenrechtskonvention (Freiheit der Meinungsäußerung) ein allgemeines Recht auf Informationszugang abzuleiten, akzeptiert aber gleichzeitig, dass die Ablehnung des Antrags auf Zugang zu Unterlagen eines Atomkraftwerks einen Eingriff in das aus Artikel 10 der Europäischen Menschenrechtskonvention resultierende Recht der Klägerin, Informationen zu erhalten, darstellt. Die Ablehnung des Antrags war jedoch zum Schutz von Betriebs- und Geschäftsgeheimnissen, der nationalen Sicherheit sowie der öffentlichen Gesundheit gerechtfertigt und stellt daher keinen Verstoß gegen die Konvention dar. Im Ergebnis weist der Gerichtshof die Klage als unzulässig ab. Die Entscheidung liegt ausschließlich in französischer Sprache vor. (Quelle: LDA Brandenburg)

Allgemein zugängliche Quelle Anwendungsbereich/ Zuständigkeit Betriebs- und Geschäftsgeheimnisse Sicherheitsaspekte

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CONSEIL                                     COUNCIL DE L’EUROPE                              OF EUROPE COUR EUROPÉENNE DES DROITS DE L’HOMME EUROPEAN COURT OF HUMAN RIGHTS CINQUIÈME SECTION DÉCISION SUR LA RECEVABILITÉ o de la requête n 19101/03 présentée par SDRUŽENÍ JIHOČESKÉ MATKY contre la République tchèque La Cour européenne des Droits de l’Homme (cinquième section), siégeant le 10 juillet 2006 en une chambre composée de : M. P. LORENZEN, président, me M S. BOTOUCHAROVA, MM. K. JUNGWIERT, V. BUTKEVYCH, me M M. TSATSA-NIKOLOVSKA, MM. R. MARUSTE, J. BORREGO BORREGO, juges, me et de M C. WESTERDIEK, greffière de section, Vu la requête susmentionnée introduite le 17 juin 2003, Après en avoir délibéré, rend la décision suivante : EN FAIT La requérante, Sdružení Jihočeské Matky, est une association de droit tchèque qui a son siège à České Budějovice. Elle est représentée devant la e Cour par M F. Korbel, avocat au barreau tchèque. Les faits de la cause, tels qu’ils ont été exposés par la requérante, peuvent se résumer comme suit.
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2         DÉCISION SDRUŽENÍ JIHOČESKÉ MATKY c. RÉPUBLIQUE TCHÈQUE A. La genèse de l’affaire En 1986, la construction selon l’ingénierie soviétique de la centrale nucléaire de Temelín fut autorisée par les autorités tchécoslovaques de l’ancien régime communiste, à l’issue d’une procédure à laquelle l’Etat fut le seul participant. Après la chute du régime communiste en 1989, il fut décidé d’achever la construction de la centrale à l’aide d’une technologie américaine. Un tel changement de technologie entraîna des modifications dans de nombreuses parties de la centrale ; à cette fin, un certain nombre de procédures administratives visant à obtenir les autorisations nécessaires furent engagées dans les années quatre-vingt-dix par l’exploitant de la centrale, une société anonyme dont l’Etat tchèque est le propriétaire majoritaire. L’association requérante fut fondée en 1991 par des personnes résidant à proximité de la centrale nucléaire de Temelín. Selon ses statuts, les missions principales de l’association sont la protection de la nature et du paysage, l’amélioration de l’environnement et le soutien au développement durable ; elle agit entre autres pour obtenir l’arrêt des technologies non- écologiques à risque, notamment de l’énergétique nucléaire. er                                         o Au 1 juin 1992, est entrée en vigueur la loi n 114/1992 sur la protection de la nature et du paysage. En vertu de son article 70, les associations de citoyens militant pour la protection de la nature et du paysage ont le droit d’être informées par les autorités de l’ouverture de toutes les procédures administratives susceptibles de toucher aux intérêts de la protection de la nature et du paysage, et de participer à de telles procédures. Le 17 janvier 1995, la requérante demanda à l’office des constructions (stavební úřad) de České Budějovice de la tenir informée de toutes les procédures administratives relatives à la centrale nucléaire de Temelín, susceptibles de toucher aux intérêts de la protection de la nature et du paysage. Néanmoins, la seule procédure à laquelle elle fut autorisée de participer, portait sur l’autorisation des changements technologiques dans la construction du bâtiment des services auxiliaires (voir point 1 ci-dessous). B. Les circonstances de l’espèce 1.     Procédure portant sur l’autorisation des changements technologiques dans la construction du bâtiment des services auxiliaires (grief soulevé le 18 juin 2003) Sur demande de l’exploitant de la centrale nucléaire de Temelín, des changements dans la construction du bâtiment des services auxiliaires furent autorisés par la décision de l’office de district (Okresní úřad) du 9 mai 1997 ; les objections de la requérante furent rejetées. Le 12 septembre 1997, cette décision fut confirmée par le ministère du
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DÉCISION SDRUŽENÍ JIHOČESKÉ MATKY c. RÉPUBLIQUE TCHÈQUE              3 Développement local. L’intéressée attaqua ces décisions par une action administrative, alléguant l’absence d’étude d’impact sur l’environnement (Environmental Impact Assessment, « EIA ») et le fait que les documents faisant partie de la décision du 9 mai 1997 ne lui avaient pas été notifiés. Par l’arrêt du 22 février 1999, la haute cour de Prague annula les décisions attaquées et l’affaire fut renvoyée devant l’office de district. Après que l’exploitant de la centrale lui soumit l’opinion positive sur l’impact environnemental des changements demandés émise par le ministère de l’Environnement le 26 mars 2001, l’office de district rendit, le 19 décembre 2001, la décision d’autorisation supplémentaire. Les objections de la requérante, concernant le caractère insuffisant et incomplet des documents présentés dans le cadre de la procédure, documents qu’elle avait pu consulter les 30 novembre et 3 décembre 2001, furent rejetées. L’office de district considéra que l’ensemble des documents présentés par le demandeur répondaient aux exigences prévues par l’arrêté ministériel pertinent et identifiaient clairement l’objet de la procédure. Entre-temps, le 4 avril 2000, la requérante - en tant que partie à la o procédure (selon la loi n 114/1992) - demanda à l’office de district de lui permettre de consulter la documentation d’origine (le projet initial), afin de pouvoir comparer les changements effectués dont l’impact environnemental (EIA) était en train d’être examiné, ainsi que le rapport sur la protection contre l’incendie qui serait à l’origine desdits changements. Elle invoqua o également la loi n 106/1999 sur le libre accès aux informations. Le 17 avril 2000, l’intéressée fut informée par l’office de district que sa o demande tombait sous le coup de l’article 133 de la loi n 50/1976 sur les o constructions, et non celle n 106/1999, et que les documents en question, faisant partie du dossier d’origine, n’étaient pas pertinents pour la procédure en cours. Les 28 novembre 2000 et 26 janvier 2001, à la suite de l’annulation en appel de sa première décision négative datée du 6 juin 2000, l’office de district invita la requérante à compléter sa demande, notamment à préciser la disposition légale servant de fondement à celle-ci et les motifs concrets justifiant la consultation des documents en question. Cette sommation resta sans réponse de la part de l’intéressée. Le 20 mars 2001, l’office de district de nouveau débouta la requérante de sa demande du 4 avril 2000, en application de l’article 133 de la loi sur les constructions. Il releva que les documents en question avaient servi de base à la conclusion du contrat entre l’auteur du projet (soviétique) et le constructeur de la centrale ; en réaction à la demande de l’intéressée, ce dernier avait invoqué la protection des informations faisant l’objet du secret commercial et des obligations contractuelles, ainsi que sa responsabilité pour la sécurité du fonctionnement et pour la protection de la centrale contre des attaques terroristes. L’office de district estima que les motifs énoncés dans la demande de la requérante du 4 avril 2000 n’étaient pas pertinents,
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4         DÉCISION SDRUŽENÍ JIHOČESKÉ MATKY c. RÉPUBLIQUE TCHÈQUE car les résultats de la procédure EIA avaient déjà été publiés ; puis, dès lors que la procédure sur l’autorisation des changements litigieux n’avait pas encore pris fin, il n’était pas possible de prévoir quels documents allaient encore être soumis par le constructeur. Il considéra en revanche que les motifs avancés par le constructeur, à savoir son devoir d’empêcher une violation du secret commercial et des obligations contractuelles et d’assurer la protection de la centrale étaient essentiels et conformes à l’intérêt exprimé dans la loi atomique. Le 27 août 2001, l’office régional (Krajský úřad) compétent, saisi de l’appel de la requérante, confirma le rejet de la demande mais précisa le dispositif et la motivation de la décision attaquée. Il souligna, d’une part, que la documentation que l’intéressée demandait de consulter contenait le projet technique soviétique ainsi que des données importantes pour assurer la sécurité de la centrale et, d’autre part, que la procédure à laquelle la requérante était partie portait uniquement sur les changements du bâtiment des services auxiliaires (suffisamment documentés), et non sur sa construction même, selon le projet initial, qui avait été autorisée longtemps auparavant. L’on ne saurait donc interpréter les dispositions légales comme donnant à la requérante le droit de consulter également les documents se rapportant à une procédure valablement terminée, bien que concernant le même bâtiment. Par le jugement du tribunal régional (Krajský soud) de České Budějovice daté du 19 décembre 2001, la requérante fut déboutée de son action administrative dirigée contre la décision du 27 août 2001. Le tribunal releva que l’article 133 de la loi sur les constructions limitait le droit d’accès aux informations et que l’objet de la procédure administrative n’était pas le bâtiment d’origine construit selon le projet initial, c’est pourquoi ce dernier ne faisait pas partie du dossier en l’espèce. La requérante ne saurait donc invoquer sa qualité de partie à la procédure portant sur les changements pour consulter la documentation soumise à l’office des constructions dans le cadre d’une autre procédure, valablement terminée, à laquelle elle n’avait pas participé. De plus, dans la mesure où toutes les données nécessaires devaient ressortir de la nouvelle documentation, les droits de la requérante en tant que partie à la procédure se trouvaient ainsi suffisamment garantis. Dès lors, sa demande ne saurait être considérée comme justifiée au sens de l’article 133 de la loi sur les constructions. En sus, le rejet de celle-ci était en l’espèce nécessaire également pour protéger le secret commercial, sachant que les données relatives à la construction d’une centrale nucléaire n’étaient pas couramment accessibles et appartenaient à l’entreprise du constructeur qui décidait de leur caractère confidentiel, ainsi que pour respecter les exigences de sécurité imposées par la loi atomique. Le 12 mars 2002, la requérante forma un recours constitutionnel, alléguant que le jugement du 19 décembre 2001 portait atteinte à son droit à l’information garanti par l’article 17 § 4 de la Charte des droits et libertés
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DÉCISION SDRUŽENÍ JIHOČESKÉ MATKY c. RÉPUBLIQUE TCHÈQUE                5 fondamentaux, car selon le principe de la publicité de l’administration publique, était accessible au public toute chose qui ne faisait pas l’objet d’une exception prévue par la loi. L’intéressée soutenait également que les o autorités auraient dû en l’espèce appliquer la loi n 106/1999 et demandait l’annulation de l’article 133 de la loi sur les constructions, contestant l’exigence de caractère justifié de la demande d’information. Puis, le fait que l’autorisation de la construction initiale était passée en force de chose jugée ne saurait selon la requérante limiter ses droits, et ni l’office des constructions ni le tribunal n’avaient spécifié l’étendue du secret commercial ; enfin, l’argument tiré de la sécurité de la centrale serait sans pertinence. Le 18 décembre 2002, la Cour constitutionnelle (Ústavní soud) déclara le recours irrecevable comme manifestement mal fondé. Elle rappela d’abord que le droit à l’information ne pouvait être limité que par la loi et dans un des buts énumérés dans l’article 17 § 4 de la Charte, à condition qu’une telle limitation soit nécessaire, dans une société démocratique, pour atteindre le but visé. La cour nota ensuite que l’article 133 de la loi sur les constructions o complétait la loi n 106/1999, en ce qu’il énonçait les conditions spéciales d’accès aux informations concernant l’aménagement du territoire et les constructions, conditions applicables à la présente affaire. Il fut relevé enfin que les documents présentés dans le cadre de la procédure portant sur les changements d’une construction devaient faire apparaître les changements en question et leur justification, et que les informations contenues dans le projet initial d’une construction (laquelle n’avait pas été réalisée et qui était à changer) ne faisaient pas partie de ce dossier. De l’avis de la Cour constitutionnelle, il n’y avait donc eu aucune atteinte au droit de la requérante à l’information car les informations demandées pouvaient être relevées dans d’autres documents auxquels elle avait accès. 2. Autres procédures invoquées par la requérante (grief soulevé le 6 novembre 2003) Après le 17 janvier 1995, date à laquelle la requérante demanda d’être informée de toutes les procédures administratives relatives à la centrale nucléaire de Temelín, susceptibles de toucher aux intérêts de la protection de la nature et du paysage, l’office des constructions de České Budějovice conduisit plusieurs procédures administratives, ayant pour objet : report de la date de l’achèvement de la construction (du 31 décembre 1997 au 31 décembre 2002), changement de la station de séchage d’air, report de la date de l’achèvement des ouvrages hydrotechniques, changement de la station de pompage, homologation du système de protection de la centrale contre les effets du gazoduc de transit, changement des parties technologiques et de construction de deux bâtiments à réacteurs. Selon la requérante, il s’agissait de changements importants ayant des répercussions sur la sécurité du fonctionnement de la centrale, sur le paysage environnant
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6         DÉCISION SDRUŽENÍ JIHOČESKÉ MATKY c. RÉPUBLIQUE TCHÈQUE ainsi que sur ses droits à elle. Or, l’office des constructions ne l’avait pas informée de l’ouverture de ces procédures et l’avait ainsi empêchée d’y prendre part. Par la suite, il justifia sa conduite en se fondant sur l’avis du département de la protection de la nature et du paysage auprès de l’office de district de České Budějovice, selon lequel lesdites procédures n’avaient pas d’impact sur les intérêts de la protection de la nature et du paysage. En 1999, le ministère de l’Environnement effectua une inspection portant sur le respect de l’obligation d’étudier l’impact des changements de la centrale sur l’environnement. Il constata que dans quatorze procédures (dont toutes les six procédures susmentionnées), une telle étude n’avait pas été élaborée même si les changements en question étaient susceptibles d’avoir des répercussions sur les intérêts de la protection de la nature et du paysage, ce qui rendait cette étude obligatoire. Sur la base de ce constat, la requérante considéra qu’elle aurait dû être o informée selon l’article 70 de la loi n 114/1992, et s’adressa aux tribunaux. Le 22 mai 2000, la requérante saisit le tribunal régional de České Budějovice de six actions administratives par lesquelles elle demandait l’annulation des décisions rendues à l’issue des procédures susmentionnées et la tenue d’une nouvelle procédure sur ces questions, à laquelle elle serait associée en tant que partie. Par les décisions rendues les 12 et 16 octobre et le 20 décembre 2000, le tribunal prononça l’extinction de la procédure, faute de capacité de la requérante de former de telles actions. Lié par l’état des faits tel qu’établi par l’autorité administrative, donc tel qu’il existait au moment de l’adoption de la décision par celle-ci, le tribunal se fonda sur l’avis du département de la protection de la nature et du paysage, selon lequel lesdites procédures n’avaient pas eu d’impact sur les intérêts de la protection de la nature et du paysage. Dès lors que la condition constituant le droit de la requérante de participer aux procédures en question n’était pas remplie, le fait que celle-ci en avait été exclue était conforme à la législation et la requérante ne pouvait donc pas s’adresser au tribunal en l’occurrence. Le 3 février 2001, la requérante forma un recours constitutionnel, invoquant notamment ses droits à un procès public et équitable, à la protection judiciaire, à la participation directe à la gestion des affaires publiques et aux informations sur l’état de l’environnement. Le 6 mai 2003, la Cour constitutionnelle rejeta le recours pour défaut manifeste de fondement. Elle nota qu’à la différence du bâtiment des services auxiliaires qui figurait sur la liste des constructions évaluées selon la procédure EIA, les changements partiels et les reports des dates dont il était question dans les procédures invoquées par la requérante ne pouvaient pas avoir d’impact sur l’environnement ; c’est pourquoi l’intéressée n’avait pas le droit d’y participer.
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DÉCISION SDRUŽENÍ JIHOČESKÉ MATKY c. RÉPUBLIQUE TCHÈQUE             7 C. Le droit interne pertinent Charte des droits et libertés fondamentaux L’article 17 § 4 dispose que la liberté d’expression et le droit de rechercher et de diffuser les informations peuvent être limités par la loi s’il s’agit de mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la protection des droits et des libertés d’autrui, à la sécurité nationale, à la sûreté publique, à la protection de la santé publique et de la morale. o Loi n 50/1976 sur les constructions En vertu de l’article 133, les autorités chargées de l’aménagement du territoire et les offices de construction, auprès desquelles se trouve déposée la documentation relative à l’aménagement du territoire et aux constructions, sont tenus de rendre possible sa consultation par les personnes ayant démontré le caractère justifié de leur demande ; ce faisant, il leur incombe de prendre des mesures visant à éviter la violation d’un secret d’Etat, commercial ou professionnel ou celle d’une obligation légale de garder le silence. o Loi n 114/1992 sur la protection de la nature et du paysage En vertu de l’article 70, les associations de citoyens militant pour la protection de la nature et du paysage ont le droit d’être informées par les autorités de l’ouverture de toutes les procédures administratives susceptibles de toucher aux intérêts de la protection de la nature et du paysage, et de participer à de telles procédures. o Loi n 18/1997 sur l’exploitation pacifique de l’énergie nucléaire et du rayonnement ionisant (dite « loi atomique ») Selon l’article 9 § 1 de cette loi, les activités liées à l’exploitation de l’énergie nucléaire exigent l’autorisation de l’Office national pour la sécurité nucléaire, autorité qui est en charge de l’administration et de la surveillance dans ce domaine. Aux termes de l’article 14 § 1, celui qui demande une telle autorisation est la seule partie à la procédure devant ledit Office. L’article 14 § 2 dispose que l’Office décide de l’autorisation après avoir vérifié que le demandeur avait satisfait à toutes les conditions prévues par cette loi et par les actes adoptés pour sa mise en œuvre.
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8         DÉCISION SDRUŽENÍ JIHOČESKÉ MATKY c. RÉPUBLIQUE TCHÈQUE GRIEFS 1. Invoquant l’article 10 de la Convention et notamment la liberté de recevoir des informations, la requérante allègue que le refus des autorités de lui permettre d’obtenir des informations dont elle avait besoin pour son activité, au motif qu’elle n’avait pas démontré le caractère justifié de sa demande, était disproportionné aux buts poursuivis et n’était pas nécessaire dans une société démocratique. 2. Invoquant l’article 6 § 1 de la Convention, la requérante se plaint de l’impossibilité de participer à certaines procédures administratives concernant la centrale nucléaire de Temelín et, partant, de défendre ses droits matériels. Elle allègue en suite que, faute d’avoir pu participer à ces procédures, elle a été empêchée de contester les décisions rendues à l’issue de celles-ci devant un tribunal de pleine juridiction, par le biais d’un recours effectif au sens de l’article 13 de la Convention. EN DROIT 1. Dans sa requête du 17 juin 2003, la requérante se plaint que les autorités nationales, en lui refusant l’accès à une partie de la documentation relative à la centrale nucléaire, ont violé son droit de recevoir des informations. Elle invoque à cet égard l’article 10 de la Convention, libellé comme suit : « 1. Toute personne a droit à la liberté d’expression. Ce droit comprend la liberté d’opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu’il puisse y avoir ingérence d’autorités publiques et sans considération de frontière. Le présent article n’empêche pas les Etats de soumettre les entreprises de radiodiffusion, de cinéma ou de télévision à un régime d’autorisations. 2. L’exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l’intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l’ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d’autrui, pour empêcher la divulgation d’informations confidentielles ou pour garantir l’autorité et l’impartialité du pouvoir judiciaire. » 1.1. La requérante allègue que malgré l’existence dans l’ordre juridique tchèque des lois portant sur le droit aux informations, les autorités nationales tendent à limiter arbitrairement ce droit, notamment dans le domaine de l’énergétique nucléaire. Tel a été selon elle le cas en l’espèce, les autorités ayant refusé sa demande de consulter les documents relatifs au projet initial du bâtiment des services auxiliaires (faisant partie de la centrale nucléaire de Temelín). L’intéressée estime qu’elle avait eu droit à ces informations non seulement du fait d’avoir été partie à la procédure
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DÉCISION SDRUŽENÍ JIHOČESKÉ MATKY c. RÉPUBLIQUE TCHÈQUE                9 portant sur les changements dudit projet, mais aussi en vertu du principe de la transparence de l’administration publique, mis en œuvre par la loi sur le libre accès aux informations. Or, les autorités nationales se sont appuyées sur une disposition légale controversée, à savoir l’article 133 de la loi sur les constructions, qui soumet l’accès à la documentation relative aux constructions à la condition de « caractère justifié » d’une telle demande d’information. Etant donné qu’il n’existe en droit interne aucune définition de cette notion, son appréciation est laissée à la discrétion des autorités, ce qui leur permet d’interpréter les restrictions du droit aux informations d’une manière assez large et générale, non susceptible de réexamen. Dans la mesure où il n’est pas nécessaire dans une société démocratique de conditionner l’accès aux informations par le besoin de démontrer le caractère justifié de la demande, l’article 133 de la loi sur les constructions est, selon la requérante, contraire à l’article 10 de la Convention. Tout en admettant qu’il peut être justifié de restreindre l’accès aux informations en vue de protéger les droits d’autrui et les informations confidentielles, la requérante soutient que l’on ne saurait atteindre ce but en exigeant que l’intéressé démontre le caractère justifié de sa demande car un tel critère se rapporte aux motifs subjectifs du demandeur et non à la nature objective des informations sollicitées. A cet égard, la requérante souligne qu’elle a en vain allégué devant les autorités nationales que les informations auxquelles elle voulait accéder servaient de base à la procédure à laquelle elle participait et que son rôle était de critiquer publiquement la centrale nucléaire ; dès lors, les informations sollicitées se rapportaient directement à son activité et elle en avait besoin pour atteindre ses buts légitimes. Selon la requérante, une limitation absolue de son droit d’accès aux informations, par le biais de l’exigence de caractère justifié de la demande, à laquelle elle ne pouvait pas satisfaire, paraît disproportionnée aux buts poursuivis en l’espèce par les autorités. La Cour rappelle d’abord que la liberté de recevoir des informations, mentionnée au paragraphe 2 de l’article 10 de la Convention, concerne avant tout l’accès à des sources générales d’information et vise essentiellement à interdire à un Etat d’empêcher quelqu’un de recevoir des informations que d’autres aspirent ou peuvent consentir à lui fournir o (Leander c. Suède, arrêt du 26 mars 1987, série A n 116, § 74). Dans ses arrêts Guerra et autres c. Italie (arrêt du 19 février 1998, Recueil des arrêts et décisions 1998-I, § 53), concernant l’absence d’informations de la population sur les risques encourus et sur les mesures à prendre en cas d’accident dans une usine chimique du voisinage, et Roche c. Royaume-Uni o ([GC], n 32555/96, § 172, CEDH 2005-...), portant sur l’absence de toute procédure d’accès à des informations qui auraient permis au requérant d’évaluer les risques pour sa santé pouvant résulter de sa participation à des tests militaires, la Cour a conclu que ladite liberté « ne saurait se comprendre comme imposant à un Etat, dans des circonstances telles que
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10       DÉCISION SDRUŽENÍ JIHOČESKÉ MATKY c. RÉPUBLIQUE TCHÈQUE celles de l’espèce, des obligations positives de collecte et de diffusion, motu proprio, des informations ». La Cour observe également qu’il est difficile de déduire de la Convention un droit général d’accès aux données et documents de caractère administratif (voir, mutatis mutandis, Loiseau o c. France (déc.), n 46809/99, CEDH 2003-XII (extraits)). En l’occurrence, la requérante a demandé de consulter des documents administratifs qui étaient à la disposition des autorités et auxquels on pouvait accéder dans les conditions prévues par l’article 133 de la loi sur les constructions, contesté par la requérante. Dans ces conditions, la Cour admet que le rejet de ladite demande a constitué une ingérence au droit de la requérante de recevoir des informations (voir, mutatis mutandis, Grupo o Interpres S.A. c. Espagne, n 32849/96, décision de la Commission du 7 avril 1997, Décisions et rapports 89, p. 150). L’intéressée alléguait avoir besoin des documents en question, lesquels se trouvaient dans un dossier relatif à une procédure valablement terminée à laquelle elle n’avait pas participé, pour pouvoir évaluer l’enjeu de la procédure en cours et pour faire valoir ses droits en tant que partie à celle-ci. La Cour relève que, en vertu de l’article 133 de la loi sur les constructions, les documents en question n’étaient pas une source d’information accessible de manière générale dans la mesure où, pour pouvoir les consulter, il fallait démontrer le caractère justifié de la demande d’information. En outre, ladite disposition enjoignait aux autorités de prendre des mesures visant à éviter la violation d’un secret d’Etat, commercial ou professionnel. Se référant audit article 133 de la loi sur les constructions, les autorités administratives et judiciaires nationales ont rejeté la demande de cette dernière en avançant plusieurs motifs. En premier lieu, elles ont considéré que les documents que l’intéressée demandait de consulter n’étaient pas pertinents pour la procédure en cours, que toutes les informations nécessaires à la décision, dont les résultats de l’étude d’impact environnemental, se trouvaient dans le nouveau dossier (accessible à la requérante) ou pouvaient en être relevées ; les droits de l’intéressée en tant que partie à la procédure étaient donc suffisamment garantis. En second lieu, les autorités ont estimé que, les données relatives à la construction d’une centrale nucléaire n’étant pas couramment accessibles, le rejet de la demande litigieuse était nécessaire pour satisfaire à la demande du constructeur de protéger le secret commercial et ses obligations contractuelles, ainsi que pour garantir la sécurité du fonctionnement de la centrale et sa protection contre des attaques terroristes. La Cour constate que les décisions rendues par les autorités tchèques sont amplement motivées et ne sauraient être considérées comme entachées d’arbitraire. Elle note que les circonstances de l’espèce se distinguent nettement de celles des affaires relatives à des restrictions à la liberté de la presse, dans lesquelles elle a maintes fois reconnu l’existence d’un droit pour le public de recevoir des informations. Or, la présente affaire concerne
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